Le multi-tâches est-il réellement efficace ?
Etes-vous un(e) adepte du multitasking ? En français, le multi-tâches, qui consiste à réaliser plusieurs choses à la fois. Spécialité des mères de famille, des ados faisant leurs devoirs ou des cadres débordés, le fait d’être en train de faire plusieurs choses en même temps nous donne souvent l’impression d’être plus efficace et d’en faire plus. Qu’en est-il ?
Passons cette habitude propre à notre société moderne au microscope de laboratoire…
« Croire que l’on est plus efficace en faisant plusieurs choses à la fois est une erreur ! »
affirme Laurence Einfalt, auteur de « S’organiser tout simplement » chez Eyrolles, et directrice de Jara, société de conseil en organisation.
D’accord, mais comment résister à la tentation d’en faire plus en un minimum de temps ? Surtout quand l’infatigable To Do List s’allonge encore et toujours, alors que les journées persistent à ne vouloir faire que 24h.
J’ai une demi-heure de libre, je vais essayer de caser ces deux ou trois trucs à faire pour m’en débarrasser et les rayer de la liste…
Vraie ou fausse bonne idée ?
Les CONTRE du multi-tâches
Des études scientifiques menées en 2009 par le professeur Earl Miller, au Massachusetts Intitute of Technology, ont mis en évidence que le cerveau était incapable de gérer efficacement plusieurs choses à la fois. Il passe d’une chose à une autre tant bien que mal et peine à tout traiter. Le cerveau s’évertue en fait à faire des allers-retours rapides entre les tâches car il ne peut pas les mener de front simultanément, et se trouve en situation de « surchauffe » !
En essayant de réaliser plusieurs choses à la fois, on met son cerveau en sur-régime. On sabote ce formidable outil ultra-perfectionné en ne l’utilisant pas dans des conditions normales de fonctionnement.
Résultat : il s’adapte bien sûr, car il est malléable et ne dit jamais non ! Mais les résultats s’en font sentir : on perd en concentration et on commet plus d’erreurs. On mémorise moins bien, certaines informations sont « zappées », et le travail effectué est plus superficiel. Pire, on met beaucoup plus de temps à effectuer tout cela…
John Medina, qui est biologiste moléculaire du développement et enseignant-chercheur, s’intéresse au cerveau et à son fonctionnement. Dans l’un de ses derniers ouvrages, Brain Rules traduit en français par « Les 12 lois du cerveau », il explique que nous commettons deux fois plus d’erreurs en faisant plusieurs choses à la fois, et qu’il nous faut également deux fois plus de temps pour faire les choses.
Le bilan est désastreux. Surprenant, non ?
Qu’est-ce qui explique donc notre impression inverse d’être ultra-efficace dans ces moments de haute activité ?
Réactivité ou productivité ?
Tout d’abord, le fait de courir dans les sens REMPLIT l’espace et le temps. Et on peut facilement en conclure que si j’ai consacré tout mon temps à certaines tâches, j’ai nécessairement été productif. Il s’agit-là d’un glissement qui s’opère entre activité et productivité. Or, ce n’est pas parce que j’ai été en mouvement que j’ai été efficace.
Au bureau par exemple, vous avez peut-être un(e) collègue qui s’agite, que vous voyez passer régulièrement dans les couloirs, ou qui est toujours occupé(e) au téléphone, avec ses emails etc. Or ce mouvement perpétuel peut-être plus une agitation qu’une réelle action productive.
Dans cette situation, l’activisme extérieur est alors une sorte de Canada Dry : ça ressemble à de la productivité à s’y méprendre, mais ce n’est qu’une illusion d’efficacité. Je peux en effet avoir mobilisé beaucoup d’énergie et obtenir un résultat très faible. Je peux aussi avoir travaillé plus lentement, avec des pauses régulières, en m’attelant à une seule tâche à la fois, et finalement atteindre une productivité beaucoup grande.
C’est que nous enseigne aussi la Loi 80/20 de Pareto : 20% de mes actions produisent 80% des résultats visés. Inutile donc de s’agiter. Au contraire, il est beaucoup efficace de se poser et de déterminer quelles sont les 20% d’actions qui seront les plus efficaces et lâcher les autres qui seront des actions « parasites » sans effet réellement impactant sur le résultat.
Pour en lire davantage sur cette question d’efficacité au quotidien, vous pouvez consulter cet autre article : https://objectif-nouvelle-vie.fr/la-semaine-de-4-heures-ou-les-12-principes-de-tim-ferriss/
Bref, comme tout excès en général, l’excès d’actions est néfaste : mieux vaut se concentrer sur un minimum d’actions ciblées, de façon posée et avec un maximum de concentration, que de s’éparpiller en voulant tout faire mais plus vite et moins bien. Or cette philosophie de vie est totalement contraire à nos habitudes modernes et à tous nos outils de communication qui nous poussent à être en contact permanent avec tout, et à ne surtout pas ralentir ni couper. La suractivité aujourd’hui est plutôt valorisée. Etre visible partout, être au courant de tout, suivre l’actualité à chaque instant, être joignable à tout moment… et must du must : être réactif !
Etes-vous réactif ? N’est-ce pas ce qui est prisé et mis en avant dans le monde du travail ?
Pourtant la réactivité demande d’être en contact permanent avec tout ce qui se passe, ce qui empêche de prendre du recul, de mûrir une action ou une réponse, et de faire le tri sereinement entre ce qui nous paraît essentiel et le reste…
Cela mérite de prendre quelques instants pour réfléchir à la façon dont nous voulons vraiment organiser notre quotidien et, au-delà, notre rythme de vie. Voulez-vous vivre à 100 à l’heure ?
Le sujet n’est pas nouveau puisque La Fontaine dénonçait déjà le contraste de vitesse entre le Lièvre et la Tortue dans sa célèbre fable. La Tortue, lente, regardée avec dédain par le Lièvre, agile, sûr de lui, prenant avec hauteur le défi que lui lance cette insignifiante et ridicule Tortue. « Sitôt, Etes-vous sage ? » lui répond-il, à comprendre comme « Est-ce bien réaliste de votre part de penser me concurrencer à la course ?. Le Lièvre, orgueilleux et sûr de lui, laisse partir la Tortue pendant qu’il vaque à d’autres occupations, persuadé de sa supériorité.
Le résultat est pourtant bien là, c’est la Tortue qui la première passa la ligne d’arrivée, laissant le Lièvre surpris et dépité.
« Rien ne sert de courir, il faut partir à point » en conclut La Fontaine.
Les apparences pourraient donc être bien trompeuses tout comme le révèlent les études menées sur le multitasking.
Prenez votre temps, sélectionnez les tâches essentielles, bravez les certitudes de ceux qui sont convaincus que la quantité est gage de productivité,et vous serez bien plus productif à l’arrivée !
Cet article vous a plu ? Laissez un commentaire et partagez-le sur Facebook ! Faites-vous plusieurs tâches à la fois ? Comment le vivez-vous ? Est-ce efficace et satisfaisant ? Quel est votre rythme quotidien, voudriez-vous en changer ? Par quoi pouvez-vous commencer ?
Sebastien
15 juin 2015 @ 3:28 pm
Hello Anne-Claire,
Pour am part, je constate que le multi-tâche nuit à la productivité : on est constamment interrompu et il est difficile ensuite de se remettre dedans par la suite.
Rien de mieux que de traiter les tâches en séquentiel.
Glatt
21 juin 2015 @ 8:24 pm
Oui et pourtant on pousse au multitâche pour plus de productivité. Hors je constate que je fais plus d’erreurs et je pers donc du temps a refaire mon travail
Aclaire
22 juin 2015 @ 2:38 pm
Oui, c’est une idée fausse que l’on se fait de la meilleure productivité… Plus on est posé et concentré sur une seule tâche à la fois, plus on se limite et on se coupe de toute source de distraction, plus on est efficace ! C’est encore difficile à faire entendre en entreprise où l’activité est valorisée au détriment de l’efficacité réelle. Et les pauses vécues comme une perte de temps 🙁 Pas simple de faire entendre son point de vue sur ce qui est bon pour soi et pour l’entreprise. Google avait beaucoup d’avance dans son management. Je publierai bientôt un article là-dessus !
Sebastien
22 juin 2015 @ 4:16 pm
Pas plus tard que ce matin en réunion, j’entaendais plusieurs personne dire à propos d’un collaborateur qu’il ne savait pas gérer plusieurs sujets en parallèle.
Ne serait-ce pas justement parce qu’il est plus efficace que les autres ?
Aclaire
22 juin 2015 @ 4:52 pm
Aïe Sébastien, voilà une remarque sacrément impertinente qui bouscule les repères établis !!! 🙂 Dur d’arriver à exister à côté du courant dominant sans subir les vagues. Il faut une sacrée confiance en soi et une bonne détermination en effet pour faire valoir son point de vue et sa façon de travailler y compris quand elle bonne et efficace !